Chronique 100_100 chroniques et après

Cette année, le congrès de la FNEEQ coïncide avec la publication de la centième chronique du comité école et société. L’occasion d’un bilan était trop belle! Vers où allions-nous à l’époque du début de ces chroniques ? La trajectoire a-t-elle changé depuis ? Et, surtout, où voulons-nous aller en cette ère de pressions à la transformation technomarchande de l’éducation et de notre profession ?

C’est au début de l’année scolaire 2007-2008 que le comité école et société de la FNEEQ publiait sa première chronique. En fait, ses premières chroniques devrions-nous dire, parce que le comité commençait en lion, avec 6 publications en septembre 2007 (total de 15 publications lors de cette première année!).

Pendant ces 17 ans de chroniques, une série de thèmes se sont imposés, principalement celui de la marchandisation de l’éducation, pour 34 des 99 chroniques. En deuxième position, le thème des actions et des solidarités syndicales nationales et internationales a inspiré la rédaction de 21 chroniques avec (sans surprise), en sous-thèmes récurrents, celui de… la marchandisation. C’est dire à quel point le virage néolibéral en éducation, amorcé depuis les années 1980, a monopolisé (et monopolise encore) l’attention de la FNEEQ. Sans compter que le sujet dominant de 12 autres chroniques renvoie au financement de l’éducation. Enfin, parmi les autres thèmes abordés dans ces 99 chroniques, nous avons relevé : le virage numérique en éducation (12 chroniques), la ségrégation scolaire et les enjeux d’équité, de diversité et d’inclusion (11 chroniques) ainsi que les thèmes de la réussite, du décrochage scolaire et des réformes de l’éducation (10 chroniques).

Devant l’impression de tourner en rond…

Ainsi, les 100 premières chroniques du comité école et société témoignent d’une tendance lourde qui était déjà sur son erre d’aller lors du lancement de ce nouveau format de publication dont l’objectif était d’offrir un son de cloche périodique sur les enjeux prioritaires en éducation ainsi que dans le milieu syndical, au Québec comme ailleurs.

Dans les dernières années, le rythme de publication des chroniques a ralenti, principalement parce que le comité école et société a reçu de nombreux mandats impliquant la rédaction de dossiers d’envergure. Mentionnons tout particulièrement ceux sur l’enseignement à distance (2019), sur les partenariats et la place de l’entreprise privée en éducation (2021) et sur l’intelligence artificielle (2023), sujets qui témoignent également de cette pression à un virage technomarchand de l’éducation qui menace l’intégrité de la profession enseignante.

Ainsi, à travers ces chroniques et ces dossiers, la FNEEQ a développé une analyse de fond des grands problèmes qui minent le système d’éducation au Québec et a su proposer à la fois des revendications et des solutions pertinentes qui, sans surprise, n’ont pas trouvé d’échos auprès de nos décideurs.

Toutefois, on se questionne également sur le degré d’appropriation de nos écrits auprès de nos membres. Que ce soit en fonction d’une saturation des sources d’information ou d’un essoufflement de plus en plus marqué des enseignant·es – du fait de la précarisation et de la détérioration de leurs conditions de travail – la discussion et la circulation de nos documents semble se limiter aux militant·es les plus engagé·es.

Or, bien que ces analyses soient essentielles à la vitalité de la réflexion de la FNEEQ, elles sont insuffisantes pour renverser la vapeur, si elles ne sont pas portées avec passion par l’ensemble de nos membres. Dans un tel contexte, il nous apparaît important d’envisager un renouveau syndical en matière de production et de circulation de l’information, en lien direct avec nos capacités de mobilisation et d’action, et nous pensons que le comité école et société peut y contribuer de belle façon.

… place à l’éducation populaire!

Dans le cadre de la fin de la négociation des conventions collectives des travailleuses et des travailleurs des services publics, et malgré des gains salariaux significatifs, bon nombre de membres de la FNEEQ sont resté·es sur leur faim. À raison, le mouvement syndical a appelé ces membres en soif de changements à s’engager au-delà des négos en poursuivant la mobilisation, par exemple par le biais d’une implication plus large des membres de la FNEEQ au sein de la Coalition Main Rouge, du mouvement Debout pour l’école ou du collectif Travailleuses et Travailleurs pour la justice climatique (TJC).

C’est dans ce même esprit que le comité école et société propose pour son prochain mandat d’aller à la rencontre des membres en faisant vivre le fruit des réflexions produites par la FNEEQ au cours des dernières années. En organisant des rencontres de discussion orientées vers l’action, partout au Québec, sur une base locale ou régionale, avec les membres ou l’ensemble de la communauté, en collaboration avec les conseils centraux de la CSN, nous pensons pouvoir contribuer à mettre en place les conditions effectives pour passer de la résistance à l’effervescence, pour construire collectivement un espace pour rêver, sans contraintes, à un renouveau en éducation et pour trouver, ensemble, sur le terrain, des façons de concrétiser ce rêve. Cette démarche d’éducation populaire viserait également à documenter et à enrichir notre compréhension des solutions fructueuses pouvant émerger d’une telle initiative.

Pour un nouvel écosystème scolaire qui prend soin du vivant

En ce sens, nous croyons qu’il faut aussi inscrire cette mobilisation dans le mouvement grandissant des Travailleuses et Travailleurs pour la Justice Climatique (TJC). Leur récent Plaidoyer pour une éducation environnementale cohérente cadre avec les positions de la FNEEQ quant à l’importance de l’humain dans le contexte actuel de pression à l’intégration massive de l’intelligence artificielle en éducation (Laurin-Desjardins, 16 mars 2024).

Tourner le dos à l’agenda néolibéral qui instrumentalise même la lutte contre les changements climatiques en occasions d’affaires dans une logique néfaste pour l’environnement et pour l’humain et militer, par des actions concrètes, pour une logique du « care » en éducation, dans l’objectif de prendre soin à la fois des humains et de la planète grâce à l’éducation et aux services publics : voilà un projet mobilisateur! Place à l’éducation populaire !

Le comité école et société

On peut contacter le comité école et société par courriel à l’adresse : cesfneeq@csn.qc.ca