« À l’évidence, le lien de confiance entre les infirmières, tant futures qu’actuelles, et l’OIIQ est brisé. Plus dommageable encore, la relation de respect entre le public et lui est ébranlée. Un coup de barre s’impose. »
Yves de Repentigny
Vice-président de la Fédération nationale des enseignantes et des enseignants du Québec (FNEEQ–CSN), 
responsable du regroupement cégep

Colère, frustration et découragement. Difficile de ne pas partager ces sentiments lorsqu’on se place du point de vue d’une jeune infirmière technicienne déjà en poste depuis des mois, très bien formée après trois années de cégep, compétente et appréciée de son milieu, mais qui, pourtant, est recalée par son ordre professionnel après avoir échoué à l’examen vicié d’entrée dans la profession. Espérant reprendre avec succès cette évaluation obligatoire, elle doit, en attendant, se résigner à travailler à désengorger le réseau de la santé en tant que « candidate à l’exercice de la profession infirmière (CEPI) ». Aussi, en plus des pertes salariales évidentes dues à son statut temporaire, si elle cumule trois échecs à cet examen biaisé de l’OIIQ, le sort en est jeté : elle est exclue de la profession pour toujours.

Or, le troisième et dernier rapport du Commissaire à l’admission aux professions, André Gariépy, portant sur les résultats inhabituellement bas à l’examen de l’OIIQ de septembre 2022, confirme ce que nous dénoncions. Cette évaluation comporte « des failles et des fragilités » importantes qui n’ont rien à voir avec la formation des candidates ou les effets de la pandémie. Le Commissaire conteste même la validité, la fiabilité et la crédibilité de l’établissement de la note de passage à l’examen. Il souligne, à mots couverts, la mauvaise foi crasse de l’Ordre, qui, malgré des déclarations publiques affirmant le contraire, n’a même pas appliqué les recommandations de son second rapport.

Bataille idéologique contre le DEC qualifiant en Soins infirmiers

En vérité, l’OIIQ mène ouvertement, depuis des années, une bataille idéologique pour faire du baccalauréat la seule porte d’entrée dans la profession. Combien d’infirmières techniciennes faudra-t-il sacrifier pour qu’il abandonne son obsession contre le DEC, corrige son examen et cesse de s’entêter au détriment de la population québécoise, qu’il est censé protéger ? En pleine pénurie d’infirmières, combien de candidates potentielles ont renoncé à s’inscrire à la formation collégiale en raison de ces attaques ? Quand, en toute transparence, l’Ordre va-t-il enfin consulter le personnel enseignant des cégeps, qui offre un programme qualifiant en Soins infirmiers complet et indispensable ? Qui le freinera afin qu’il ne puisse imposer un examen américain (NCLEX-RN) dès 2024, alors que l’adaptation de celui-ci à la réalité québécoise en un si court délai nécessiterait un travail colossal et une collaboration très étroite avec tous les acteurs du milieu ?

À l’évidence, le lien de confiance entre les infirmières, tant futures qu’actuelles, et l’OIIQ est brisé. Plus dommageable encore, la relation de respect entre le public et lui est ébranlée. Un coup de barre s’impose. L’Ordre ne peut plus jouer d’arrogance et se cacher derrière son indépendance ainsi que son sentiment d’impunité pour élaborer encore un examen d’entrée à la profession inadéquat. À cet égard, nous souhaitons sa mise sous tutelle pour mieux protéger les Québécoises et les Québécois, ce qui devrait en principe constituer le cœur même de sa mission.

Pour la suite des choses, nous estimons qu’il faut maintenant se concentrer sur la révision du DEC qualifiant en Soins infirmiers, qui se fait attendre depuis trop longtemps.