Collectif – lettre publiĂ©e dans le journal Le Soleil et sur Cyberpresse le 19 aoĂ»t, dans le journal Le Devoir du 20 aoĂ»t 2007.

C’est aujourd’hui un lieu commun de dire que nous vivons Ă  l’ère du nĂ©olibĂ©ralisme. Une Ă©poque oĂą l’État est vu comme un obstacle Ă  la croissance Ă©conomique et oĂą le libre marchĂ© doit rĂ©gner en maĂ®tre. OĂą les normes du travail et le salaire minimum apparaissent comme des rigiditĂ©s entravant le jeu de l’offre et de la demande. OĂą les syndicats dĂ©fendraient des intĂ©rĂŞts corporatistes rĂ©trogrades alors que les grands patrons seraient devenus des promoteurs du bien commun. OĂą la fonction publique est perçue comme une bureaucratie inutile et les entreprises comme des bienfaitrices socialement responsables. OĂą le peuple est appelĂ© Ă  se serrer la ceinture alors que les entreprises reçoivent des subventions et que des dizaines de milliards de dollars s’envolent chaque annĂ©e en Ă©vasion fiscale.

OĂą les impĂ´ts des mieux nantis baissent alors que les tarifs des services publics augmentent. OĂą l’aide au dĂ©veloppement sert Ă  acheter des armes. OĂą les capitaux et les marchandises font le tour du monde alors que les personnes sont fichĂ©es et bloquĂ©es aux frontières. OĂą les travailleurs et travailleuses sont du capital humain, les problèmes Ă©cologiques des « externalitĂ©s » et le travail des enfants de la concurrence dĂ©loyale.

Les partisans de ce nĂ©olibĂ©ralisme vont encore plus loin et accusent maintenant plusieurs acteurs sociaux, organismes communautaires, syndicats et autres regroupements de paralyser le dĂ©veloppement Ă©conomique du QuĂ©bec. Devant l’opposition de la sociĂ©tĂ© civile Ă  leurs projets et leurs rĂ©formes, ils crient Ă  l’immobilisme, au corporatisme, Ă  un attachement dĂ©modĂ© aux valeurs de la social-dĂ©mocratie. Les groupes opposĂ©s Ă  leurs projets sont ainsi prĂ©sentĂ©s comme Ă©tant contre l’essor du QuĂ©bec, alors que leur dĂ©vouement, leurs valeurs et leur engagement les amènent au contraire Ă  vouloir le faire grandir, le faire progresser… de façon diffĂ©rente !

Une importante partie de la population quĂ©bĂ©coise dĂ©sire une autre Ă©volution pour le QuĂ©bec. Un QuĂ©bec plus Ă©galitaire, plus ouvert et dont le dĂ©veloppement va s’appuyer avant tout sur des valeurs sociales et Ă©cologiques plutĂ´t que sur les seuls impĂ©ratifs Ă©conomiques. Un QuĂ©bec qui sera plus Ă  l’Ă©coute de ses citoyens et de l’ensemble des organisations qui le composent, et pas seulement des grandes entreprises et leurs groupes de pression qui ne pensent qu’Ă  voir gonfler le PIB. Un QuĂ©bec qui va oser ĂŞtre diffĂ©rent des sociĂ©tĂ©s qui l’entourent parce qu’il comprend que l’Histoire ne saurait s’arrĂŞter sur un seul modèle de sociĂ©tĂ©. Nous avons collectivement le pouvoir de crĂ©er une sociĂ©tĂ© meilleure et il est possible de façonner le monde selon d’autres aspirations.

On parle peu du travail important accompli par un grand nombre d’organisations et par une multitude de personnes, souvent bĂ©nĂ©voles, qui travaillent concrètement Ă  dĂ©velopper des projets, Ă  seconder les personnes en situation de pauvretĂ© dans l’amĂ©lioration de leur situation de vie, Ă  crĂ©er et Ă  promouvoir des emplois de qualitĂ© et des conditions de travail dignes, Ă  dĂ©velopper des solidaritĂ©s avec les peuples du Sud qui luttent pour Ă©radiquer la pauvretĂ©, Ă  penser des alternatives Ă©cologiques pour protĂ©ger nos Ă©cosystèmes, Ă  protĂ©ger les droits de toutes et tous, Ă  favoriser l’expression des diverses cultures, Ă  mieux informer la population, Ă  restituer un sens Ă©thique Ă  la vie en sociĂ©tĂ©. Un lieu de mise en commun de ces autres façons de faire est aujourd’hui nĂ©cessaire.

VoilĂ  pourquoi nous participerons au premier Forum social quĂ©bĂ©cois qui aura lieu du 23 au 26 aoĂ»t Ă  MontrĂ©al, Ă  l’UQAM et au parc Émilie-Gamelin. Ce Forum, dans la continuitĂ© de ceux qui se tiennent un peu partout dans le monde et Ă  diffĂ©rentes Ă©chelles depuis celui de Porto Alegre en 2001, se veut un espace de prise de parole, d’Ă©change, de dialogue, d’Ă©ducation populaire, de pratique citoyenne, de rĂ©seautage et d’Ă©laboration de programmes d’action concertĂ©s dans le but de stimuler le dynamisme des mobilisations sociales et de la vie dĂ©mocratique afin de construire, ensemble, une sociĂ©tĂ© solidaire, dĂ©mocratique, juste et durable au QuĂ©bec. Il est de notre responsabilitĂ©, en tant que citoyens et citoyennes du QuĂ©bec, de participer Ă  la construction de notre sociĂ©tĂ© et de revendiquer la place qui nous revient afin que notre milieu de vie collectif n’Ă©volue pas au seul grĂ© de la logique de l’argent.

Ont signé ce texte:

Rachad Antonius, Michèle Asselin, Alain Auger, Normand Baillargeon, Pierre Beaudet, Louise Beaudoin, Lina Bonamie, Geneviève Bond-Roussel, Marie-HĂ©lène Bonin, RomĂ©o Bouchard, Deborah Bourque, Gilles Bourque, Dorval Brunelle, Sophie Cadieux, Ronald Cameron, Claudette Carbonneau, AndrĂ©-Pierre Contandriopoulos, Claudette Demers-Godley, Boucar Diouf, Gilles Dostaler, Pascale Dufour, Guy Dufresne, Gilles Dussault, Bernard Émond, Lance Evoy, Conseil exĂ©cutif de l’ASSE, Jean-Marc Fontan, Steve Foster, Pierre Gaudreau, Yolande Geadah, Mariette GĂ©linas, Lorraine Guay, Jean-Pierre HĂ©tu et Micheline BĂ©lisle, Robert Jasmin, Evan Kapetanakis, Tania Kontoyanni, Daniel Lamoureux, Maxime Laplante, GĂ©rald Larose, Anne Latendresse, Hugo Latulippe, Georges LeBel, Peter Leuprecht, Raymond Levac, Yan Levasseur, Margie Mendell, Maria-Luisa Monreal, Hugo Montecinos, Jean Panet-Raymond, RĂ©jean Parent, François Parenteau, Ghislain Picard, Jean-Marc Piotte, Denis Prescott, Ianis Queval, MikaĂ«l Rioux, Patrice Rodriguez, Serge Roy, RomĂ©o Saganash, Michel Sawyer, Pierre-Yves Serinet, Eric Shragge, David Sines, Alice Tofan, Armand Vaillancourt, BĂ©atrice Vaugrante, Dominique Verreault, Laure Waridel, Karen Young.

On trouvera aussi ici la dĂ©claration finale de l’AssemblĂ©e des mouvements sociaux Ă  l’occasion du Forum social quĂ©bĂ©cois Ă  laquelle la FNEEQ a souscrite.

Un appel solidaire des mouvements sociaux : UniEs pour l’avenir du QuĂ©bec et du monde.