Depuis quelque temps maintenant, le dossier de la violence subie par le corps enseignant, principalement aux secteurs primaire et secondaire, s’est étoffé de plusieurs études. De semaine en semaine, les articles de journaux, les émissions de télévision font état de cette situation alarmante. Les manchettes couvrent de plus en plus souvent des cas de jeunes – qui s’amusent entre eux à des joutes violentes, qui se font rouer de coups dans les cours d’école, qui se font menacer et sont victimes de « mobbing » via internet, mais également de jeunes qui s’en prennent physiquement, verbalement et psychologiquement à leurs enseignantes et leurs enseignants. La situation est préoccupante ! Dans l’une des études, effectuée en novembre 2006, par Denis Jeffrey, professeur à l’Université Laval, il est mentionné que :

« Notre enquête auprès de jeunes enseignants nous a permis de constater que la violence qu’ils vivent peut contribuer au désir de quitter l’enseignement s’ils ne se sentent pas soutenus dans leur travail. Cela signifie qu’un enseignant victime de violence qui se sent moins soutenu par son milieu scolaire aura plus de chances qu’un autre de quitter la profession. »

« Il semble que le désir de quitter l’enseignement est moins lié à un événement de violence en particulier qu’à un ensemble d’incidents violents qui suscite chez l’enseignant un sentiment d’insécurité. »

Encore faut-il s’entendre sur la définition du mot violence, sur ce qu’elle recouvre en tant que comportements, sur les diverses perceptions de ces comportements, sur le niveau de tolérance face à ces comportements, sur le sentiment de menace et d’insécurité et ainsi de suite. À la lumière de quelques définitions du mot « violence », posons-nous la question suivante : « Dans l’établissement où j’enseigne, ai-je déjà subi ou été témoin :

  • d’une attitude ou d’un acte basé sur un usage abusif de la force ou du pouvoir;
  • d’une attitude ou d’un acte qui cause du tort à autrui;
  • d’une attitude ou d’un acte qui porte atteinte à une personne morale ou physique;
  • d’une attitude ou d’un acte qui met la sécurité en danger;
  • d’une attitude ou d’un acte brutal, irrespectueux, intimidant, dévalorisant, discriminant, menaçant, etc.

Qui plus est, quelle est ma tolérance face à ces manifestations ? Sont-elles, pour moi, toutes des manifestations que je considère comme violentes ? »

Si, comme il est mentionné dans le document de Denis Jeffrey, le désir de quitter l’enseignement est plus fréquent lorsque l’enseignante ou l’enseignant ne se sent pas soutenu-e, il faut donc s’interroger sur le rôle que doivent jouer les directions scolaires. Plus que le fait d’être victime de violence, l’isolement et le manque de soutien semblent davantage peser dans les facteurs d’abandon de la profession.

Dans un article du mardi, 15 janvier, de la journaliste, Émilie Côté, intitulé Le plan du ministère de l’Éducation attendu de pied ferme, la journaliste précisait que le corps enseignant et les syndicats espèrent des « orientations claires sur la cyberintimidation » de la part du ministère. La veille, la même journaliste, dans un article intitulé Cyberintimidation : les écoles réagissent enfin , faisait d’ailleurs état de l’inaction des directions scolaires face au nouveau phénomène de la cyberintimidation. Pourtant, pour les enseignantes et enseignants qui se retrouvent sur Youtube ou Facebook, la violence vécue est bien réelle. La publication de l’image d’une personne, prise à son insu, a d’ailleurs déjà fait l’objet d’un jugement de la Cour suprême, dans Aubry c. Éditions Vice-Versa inc, [1998] 1 R.C.S. 591. Ce jugement soutient que le droit à l’image est une composante du droit à la vie privée (art. 5 de la Charte québécoise des droits et libertés). Dans l’état actuel des choses, ce jugement pourrait sûrement être utile aux différents intervenants.