Les dangers qui menacent l’enseignement supérieur appellent la formation de coalitions et d’alliances les plus larges, les plus nombreuses possibles. Non seulement parce qu’elles permettent d’établir et d’élargir nos solidarités, et ainsi briser l’état d’isolement dans lequel sont plongés de force certains groupes, mais aussi parce qu’elles contribuent au partage d’informations et de stratégies tout en permettant une plus grande diffusion de nos valeurs et revendications. La participation de la FNEEQ à la 8e Campagne pour le futur de l’enseignement supérieur¹ (CFHE) s’inscrit exactement dans cette démarche.

Campagne pour le futur de l’enseignement supérieur

Plus d’une centaine d’enseignantes et d’enseignants permanents et contractuels, d’étudiantes et d’étudiants ainsi que des membres de la communauté, se sont réunis à Los Angeles du 16 au 18 janvier 2015. Des quatre coins des États-Unis, ces militantes et militants se retrouvent deux fois par an pour échanger et établir des stratégies afin de contrer l’anéantissement des institutions d’enseignement supérieur. Au cœur des discussions, échanges et débats, les multiples dangers de l’omniprésence grandissante du privé dans les collèges et universités aux États-Unis, l’augmentation vertigineuse des droits de scolarité et donc de l’endettement étudiant²… bref des situations bien connues ici aussi. Sylvain Marois, vice-président de la FNEEQ, responsable du regroupement université, avait été invité par CFHE pour donner une conférence sur le travail en coalition à la FNEEQ. Seul conférencier «étranger» (et donc, seul canadien et seul représentant du Québec), il a pu présenter, entre autres, notre rôle et notre contribution au sein de la Coalition opposée à la privatisation et à la tarification des services publics, sans doute la plus diversifiée des coalitions québécoises. Celle-ci permet à la fédération de travailler à la défense de l’enseignement supérieur, comme service public, tout en combattant l’ensemble des politiques d’austérité du gouvernement. Plus spécifiquement sur l’enseignement supérieur, le conférencier invité a insisté sur l’alliance avec la FEC-CSQ dans le cadre des négociations de la convention collective des cégeps et sur les travaux de la Table des partenaires universitaires³ (TPU), notamment sur les compressions dans les universités. Un des objectifs de la conférence était de montrer que le combat se réalise sur les deux fronts, c’est-à-dire dans des coalitions dont le travail est axé sur les conditions de travail et les négociations, mais aussi sur le front social en s’engageant dans l’organisation et la participation à des manifestations pour contrer le tsunami néolibéral dont nous sommes collectivement victimes. Plus spécifiquement sur les personnes chargées de cours, il est toujours intéressant de mentionner, ici et ailleurs, que le regroupement université est sans doute le plus grand regroupement exclusivement constitué d’enseignantes et d’enseignants universitaires contractuels à ne pas être «noyé» dans une accréditation incluant aussi des membres permanents. Ce modèle distinctif soulève toujours beaucoup de questions et commentaires.

La FNEEQ participait pour la deuxième fois à CFHE. l’an dernier, à Albany, notre participation avait été remarquée, et c’est ce qui a motivé les organisateurs à nous inviter cette fois-ci pour présenter une conférence. Encore une fois, cette année, une grande place a été faite aux étudiantes et étudiants qui vivent une panoplie de difficultés aux États-Unis, dont l’endettement et le manque d’accessibilité aux études supérieures. L’édition californienne de CFHE a toutefois été marquée par le thème des études éthiques. Un peu à l’image des études de genre, les panellistes souhaitaient sensibiliser les participantes et participants à des réalités particulières, notamment le taux élevé d’abandon chez les hommes afro-américains. Ils ont constaté que seulement 9% d’entre eux complétaient un programme de littérature standard de 6 ans (essentiellement la littérature anglo-européenne parsemée d’auteurs blancs), alors que 100% graduaient dans le programme «Panafrican Studies». Les conférenciers ont donc insisté sur l’importance de mettre en place des départements d’études éthiques pour étudier le phénomène et compiler des données sérieuses, mais aussi pour créer une image positive de réussite universitaire issue de la communauté afro-américaine.

Au-delà des avantages mentionnés en début de cette chronique, une des caractéristiques de CFHE est son mode de fonctionnement, ponctué par des discussions en ateliers. Ces échanges en petits groupes permettent aux personnes participantes de se connaitre, mais aussi de chercher des points de convergence. Le tout est ramené en plénière pour identifier ce qui fait largement consensus. Ensuite, le tout retourne en atelier mais, cette fois, pour identifier des actions concrètes en lien avec les consensus dégagés. La critique du désengagement de l’État dans le financement public en enseignement supérieur a largement rassemblé les participantes et les participants cette année4. En effet, ce désengagement est, un peu partout, la source première de l’effritement des institutions collégiales et universitaires. Parmi les actions proposées, à l’échelle continentale, il y a la production de capsules vidéo sur ce sujet de première importance. À titre d’exemple, soulignons que la FNEEQ a réalisé l’ajout de sous-titres en français à l’une de ces vidéos. Celle-ci, produite l’an dernier, traite de la question des Cours en ligne ouverts à tous5 (CLOT). Vous pouvez voir la vidéo ici : https://vimeo.com/118651871.

Enfin, pour la FNEEQ, ces alliances s’inscrivent parfaitement dans le travail que nous accomplissons au sein de l’Internationale de l’Éducation. Nous croyons qu’à force de répéter que les gouvernements doivent faire de l’éducation publique une priorité et en insistant sur les dangers qui menacent l’éducation là où l’État ne joue pas ce rôle, nous portons les valeurs chères à nos membres, mais aussi, et surtout, que nous nous faisons les défenseurs de l’éducation comme droit humain et bien commun.

Le comité école et société

On peut contacter le comité école et société par courriel à l’adresse: cesfneeq@csn.qc.ca

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  1. Campaign for the Future of Higher Education: http://futureofhighered.org/ .
  2. La situation est critique aux États-Unis. La dette étudiante dépasse maintenant celle des cartes de crédit et est évaluée à plus d’un trillion. Au Canada, bien que la situation soit «moins dramatique», le total de la dette étudiante dépasse les 15 milliards. Sur le total de la dette étudiante aux États-Unis: http://www.finaid.org/loans/studentloandebtclock.phtml. Sur la situation canadienne : http://www.debt101.ca/news/how-big-is-canadas-student-debt-today. Enfin, sur la privatisation de la dette étudiante aux États-Unis: http://www.occupy.com/article/how-sallie-mae-and-privatization-student-loans-eroding-america
  3. La TPU est une table de concertation réunissant l’ensemble de la communauté universitaire, soit les associations étudiantes, la Fédération des professeurs et professeurs, les personnes employées de soutien, les étudiantes et étudiants salarié-es, les chercheuses et chercheurs, les personnes chargées de cours, bref, tout ce qui grouille dans une université.
  4. Pour en savoir plus sur le financement en enseignement supérieur, le Panorama 2014 de l’OCDE: http://www.oecd-ilibrary.org/education/regards-sur-l-education_19991495 .
  5. Communément appelés MOOC.