Pierre Patry, le président de la Fédération nationale des enseignantes et des enseignants du Québec (FNEEQ-CSN) a prononcé l’allocution d’ouverture du 26e congrès de la fédération qui s’amorce aujourd’hui à Rimouski. Normand Gagnon, président du conseil central du Bas Saint-Laurent a livré un message d’accueil et Louis Roy, vice-président de la CSN, a présenté les priorités de travail de la confédération.
Réunis sous le thème L’Education … pour agir les quelque 200 représentantes et représentants des 70 syndicats affiliés à la FNEEQ-CSN seront à Rimouski du 27 au 30 mai prochains pour déterminer et adopter les perspectives stratégiques ainsi que les pistes d’action qui orienteront les actions de la fédération pour les trois années à venir. Les propositions sont axées autour de 6 grands thèmes: le droit à l’éducation, l’autonomie professionnelle, l’action internationale des syndicats, la vie syndicale, la formation des maîtres ainsi que le harcèlement psychologique et la violence au travail.
Le droit à l’éducation
En ce qui concerne plus particulièrement la question du droit à l’éducation, signalons tout d’abord que l’UNESCO évalue à 2 000 milliards de dollars américains le marché potentiel de ce secteur… ce qui ne laisse pas indifférents tous les marchands de ce monde!
Mentionnons également que dans ce cadre, l’enseignement supérieur est particulièrement vulnérable aux tentatives de commercialisation, tant par la négociation de l’Accord général sur le commerce et les services (AGCS) à l’Organisation mondiale du commerce (OMC) que dans les discussions en vue de la création d’une zone de libre- échange des Amériques (ZLEA) en 2005.
La FNEEQ-CSN se préoccupe depuis plusieurs années de cette question. L’organisation d’un colloque spécifique sur ce sujet en avril 2001 Des Amériques solidaires pour le droit à l’éducation a d’ailleurs révélé une sensibilisation marquée des syndicats affiliés et groupes partenaires à la problématique que pose la commercialisation de l’éducation.
L’éducation forme des travailleuses et des travailleurs, qui seront aussi des citoyens. La négociation de traités commerciaux qui incluraient le secteur de l’éducation risque de faire disparaître la dimension humaniste de l’éducation. La FNEEQ-CSN entend continuer à lutter contre la conclusion de traités “qui mettent en péril nos choix sociaux et la souveraineté des Etats” ajoute Pierre Patry.
Par ailleurs, si un certain autoritarisme gestionnaire a envahi le monde de l’éducation en étroite collaboration avec l’évolution des attentes et des discours du monde économique, cela introduit dans le système d’enseignement des valeurs et des pratiques proprement économistes comme la compétitivité, le rendement, l’efficience, l’imputabilité et l’obligation de résultats. C’est le caractère public de notre système d’éducation qui est remis en question, et cela, quel que soit l’ordre d’enseignement dans lequel on évolue. De réforme en réforme, on voudrait soumettre le réseau de l’éducation uniquement au bon vouloir des lois du marché.
Pour la FNEEQ-CSN, la finalité de l’éducation repose de façon indissociable sur l’épanouissement des personnes dans toutes leurs dimensions. C’est la raison pour laquelle les délégué-es seront invités à réaffirmer leur opposition au désengagement de l’Etat dans le domaine des services publics. Rappellerons que l’éducation est un droit social dont l’accès et la pleine réalisation s’étendent tout au long de la vie dans le cadre d’un système d’éducation public, laic, gratuit et de qualité.
Par ailleurs, les organisations syndicales doivent défendre et promouvoir l’exercice de l’autonomie professionnelle, tant individuelle que collective. Les délégué-es de la FNEEQ-CSN seront invités à réaffirmer que la liberté académique, inhérente à la profession enseignante, est le prolongement de la liberté d’expression au sein de l’institution. Ils seront également invités à mandater la fédération pour procéder à une réflexion sur la réalisation de la liberté académique selon les ordres d’enseignement (collégial, universitaire et primaire-secondaire).
La vie syndicale
Le monde du travail est en profonde mutation, de grandes tendances se dégagent pour les prochaines années, le vieillissement de la main-d’oeuvre et les nombreux départs à la retraite nous interpellent, particulièrement en ce qui a trait au transfert des connaissances et de l’expertise tant professionnelle que syndicale. Il est primordial d’assurer une relève syndicale et c’est sous cet angle que nous entamerons une réflexion dès à présent. La conjoncture n’est pas simple et les enjeux sont de taille. Il y a un défi que nous nous apprêtons à relever.
L’impact de l’élection du PLQ
Les enjeux que nous avons évoqués plus haut en regard du droit à l’éducation et à la volonté de nombreux tenants du néolibéralisme de commercialiser le secteur de l’éducation ont des répercussions au Québec. L’avènement du Parti libéral du Québec au pouvoir le 14 avril dernier et sa volonté annoncée d’opérer une révision du rôle et de la taille de l’état présagent des luttes acharnées. Les déclarations de la présidente du Conseil du trésor, qui s’appuie sur le rapport Breton pour évoquer un déficit de 4,3 milliards de dollars dans le budget du gouvernement, laissent planer des doutes quant à la volonté réelle du PLQ d’accorder une priorité à l’éducation.
Quant au ministre de l’Education, Pierre Reid, il a déjà laissé entrevoir la possibilité de nouvelles réductions budgétaires. “Cela est totalement inacceptable”, indique Pierre Patry. Outre le fait que le réseau de l’éducation a dû composer avec des compressions de 1,9 milliard de dollars de 1994 à 1999 et qu’une phase de réinvestissement avait démarré à la suite des engagements pris au Sommet du Québec et de la jeunesse, force est de constater que le cadre financier mis de l’avant par le PLQ soulève des sérieux questionnements, puisque les chiffres avancés pour le secteur de l’éducation ne couvrent ni l’inflation ni les coûts de système.
Comment dès lors concilier le discours du Parti libéral qui accorde une priorité à l’éducation et le fait que son cadre financier ne le traduise pas? La réponse viendra probablement lors du discours inaugural de Jean Charest au début du mois de juin et la présentation du budget du gouvernement à la mi- juin. Une chose est sûre, la FNEEQ-CSN continuera de se battre pour assurer aux jeunes et aux adultes une éducation de qualité.
Une solidarité qui s’exprime
Le congrès est également un moment important pour l’expression de la solidarité. Refaat Sabbah est directeur du Teacher Creativity Center, qui est basé à Ramallah dans les Territoires occupés de Palestine. Cette ONG palestinienne, créée en 1995, a pour but de sensibiliser la population au rôle que joue l’éducation dans la promotion de la démocratie et la justice. Il viendra partager avec les délégué-es de la FNEEQ-CSN le difficile contexte dans lequel les enseignantes et les enseignants palestiniens doivent exercer. Territoires bouclés, écoles fermées, rendent souvent la fréquentation scolaire impossible.
L’éducation … pour agir
En conclusion, Pierre Patry affirme que comme société, il nous faut l’éducation pour agir. Pour l’avènement d’une société juste, équitable et démocratique. L’éducation… pour agir contre les discriminations, l’éducation pour agir pour la paix. En bref, l’éducation pour agir tout court!
La FNEEQ-CSN est l’organisation syndicale la plus représentative de l’enseignement supérieur au Québec. Elle représente 23 500 membres: 14 000 enseignantes et enseignantes de cégep (soit près des deux tiers), 8 000 chargées et chargés de cours dans les universités (soit la vaste majorité) et 1 600 enseignantes et enseignants dans les établissements privés.
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Pour renseignements:
France Désaulniers
conseillère aux communications, FNEEQ-CSN
Tél. : 514-598-2484 cell. : 514-219-2947