Dans une décision rendue publique hier, l’arbitre Pierre A. Fortin a reconnu le bien-fondé de la démarche du Syndicat du personnel enseignant du Collège Ahuntsic (SPECA) affilié à la FNEEQ et à la CSN, contre le Collège Ahuntsic dans un dossier politique important pour l’ensemble du personnel enseignant des cégeps. En effet, l’arbitre a reconnu que le travail non rémunéré exigé des enseignantes et des enseignants par le collège, en compensation des activités perdues lors de l’exercice de journées de grève, a pour conséquence «d’annuler tout effet de ladite grève et même de la vider de son sens.» Il ajoute de plus que demander sans compensation financière de tels services aux enseignantes et aux enseignants constituerait «une application privilégiée pour les collèges puisqu’en tout autre secteur, si le travail est repris, il est rémunéré.» En conséquence, l’arbitre «ordonne au Collège de payer le salaire aux enseignantes et aux enseignants pour ladite reprise de travail.»
Cette décision est une première concernant l’exercice du droit de grève dans l’enseignement collégial. Les syndicats d’enseignantes et d’enseignants de cégep ont toujours eu le sentiment que les collèges jouissaient d’un avantage inéquitable, lorsqu’ils utilisaient des obligations légales d’un autre ordre pour exiger du personnel enseignant la reprise des activités perdues lors d’un arrêt de travail légal. Aucun autre salarié de l’État ne se trouve dans une telle situation et les salariés bénéficient, lorsque la reprise du travail est nécessaire, d’une compensation salariale.
Dans le contexte de la fin des négociations dans le secteur public, marquée par la loi 43 qui décrétait les conditions de travail et les salaires en décembre 2005, le personnel enseignant de cégep a conservé le sentiment non seulement que cette action unilatérale, mettant brutalement fin aux négociations, était un déni du droit d’organisation et du droit de négociation, mais également que les directions d’établissements collégiaux allaient dans le même sens en exigeant des enseignantes et des enseignants de reprendre les cours perdus sans compensation. Dans les faits, le personnel enseignant de cégep se voyait ainsi privé du droit de grève, pourtant considéré comme légitime – et légale – dans une société démocratique.
«La bataille juridique du Syndicat du personnel enseignant du Collège Ahuntsic concernant les journées de grève de 2005 est, de ce point de vue, un combat crucial pour l’ensemble du mouvement syndical enseignant dans les cégeps», affirme le président de la FNEEQ, Ronald Cameron. C’est pourquoi la FNEEQ et la CSN ont déployé les moyens nécessaires pour soutenir les représentations du syndicat et comptent maintenant faire en sorte que le tort subi par des enseignantes et des enseignants d’autres établissements, dont les syndicats sont affiliés à la FNEEQ, puissent obtenir la même reconnaissance et la même compensation.
La FNEEQ est l’organisation syndicale la plus représentative de l’enseignement collégial au Québec. Elle regroupe les deux tiers des enseignantes et des enseignants de cégep.