Pourquoi un tel colloque alors qu’ici, au Québec, l’égalité de droits pour les femmes semble déjà toute acquise? À quoi ce colloque peut-il être utile, si l’on croit qu’il suffit de vouloir pour pouvoir? Peut-être, dans un premier temps, tout simplement à se rendre compte qu’il y a un décalage entre l’égalité de droits et l’égalité de faits, ici, au Québec, même dans le milieu syndical.
À la veille du 40e anniversaire de la fondation de la FNEEQ, à la suite d’une proposition du Comité femmes pour documenter et interpeller la place des femmes dans notre organisation, la FNEEQ organise un colloque, les 29 et 30 mai, afin non seulement de soutenir la réflexion, sans amertume mais sans complaisance, sur la réalité du pouvoir au féminin, mais aussi pour améliorer la place des femmes au sein de la FNEEQ.
Bien sûr, il faut mesurer le chemin parcouru et prendre acte de l’immense avancée des femmes dans notre société, l’une des plus avangardistes à cet égard. Cependant, signale Caroline Senneville, secrétaire générale de la Fédération nationale des enseignantes et des enseignants du Québec (FNEEQ-CSN), «si le pourcentage du nombre de femmes syndiquées à la fédération augmente, leur participation aux instances ne le reflète que partiellement.» Les femmes composent la moitié du membership de la fédération. À l’heure du renouvellement massif du personnel enseignant, il importe de faire un pas de plus, à la fois pour informer nos nouveaux membres et les sensibiliser à l’importance de la participation aux instances syndicales. C’est une question de démocratie. Déjà en 1995, la FNEEQ avait adopté des mesures afin de favoriser le militantisme des femmes. Que l’on pense au remboursement de frais de garde, à l’ajournement des réunions à 17 heures ou encore au fait qu’il n’y ait pas de réunion la fin de semaine.
Saluant l’initiative de la FNEEQ, Claudette Carbonneau, présidente de la CSN, reconnaît que les avancées des quarante dernières années permettent à bon nombre de femmes de vivre l’égalité dans leur choix de carrière, l’accès aux études, le partage de leurs tâches avec leurs conjoints, leur choix d’avoir des enfants et du moment de les avoir, etc. «Pourtant, indique-t-elle, dans presque tous les domaines, les statistiques démontrent que les inégalités persistent et que l’accession des femmes aux postes de pouvoir, bien qu’en progression, demeure un champ où des actions importantes restent à faire.»
Elle souligne en outre « le rôle important que jouent les enseignants et les enseignantes afin d’encourager les filles et les femmes à prendre leur place. «Vous êtes présents dans leur vie de façon privilégiée quand vient le temps pour toutes ces étudiantes de faire leur choix de carrière et plus globalement de concevoir la place et les espaces qu’elles ont à occuper dans la société.»
Mme Carbonneau insiste sur le travail à faire pour amener les femmes à prendre leur place en milieu syndical. «Ce travail passe d’abord par la prise en charge de cette question dans les syndicats de base. C’est là que les femmes syndicalistes prennent d’abord leur expérience. C’est là qu’elles peuvent aussi à travers la participation aux instances de leur fédération, de leur conseil central, de la CSN, prendre le goût d’une implication syndicale plus large».
Du côté de la vie publique
À l’heure où le cabinet du gouvernement québécois est composé d’un nombre égal d’hommes et de femmes, où une femme est également à la tête d’un parti d’opposition, il serait inopportun de prétendre qu’elles n’ont pas accès au pouvoir. Pourtant, si on regarde de plus près, si on cherche un portrait d’ensemble, on voit que la réalité est peut-être plus nuancée. Combien y a-t-il de femmes dans tous les lieux de pouvoir: politique municipale, magistrature, conseils d’administration privés ou publics, parlement canadien. Quand elles y sont, quelles fonctions y occupent-elles? Caroline Senneville souligne que la FNEEQ a voulu des témoignages de femmes qui ont marqué à leur façon la vie publique au Québec.
Le colloque sera donc l’occasion d’entendre Mme Elaine Hémond relater les expériences menées par le Groupe Femmes, politique et démocratie qui travaille avec les femmes candidates de partis politiques. Quant à Francine Lalonde, députée du Bloc québécois, Lise Payette, qui fut la première à revendiquer le titre de Mme la ministre, Claire L’Heureux-Dubé, première Québécoise à siéger à la Cour suprême, maintenant à la retraite, et Geneviève Baril, chargée de programmes à l’Institut du Nouveau monde seront réunies pour une table ronde traitant de la question des femmes et du pouvoir.
Une place à prendre
Mme Senneville conclut que «l’objectif de ce colloque est de renforcer les mesures de soutien aux femmes et aux comités exécutifs afin de viser la représentation de la moitié des membres des syndicats, les femmes, à la direction de nos organisations. Parce qu’à la FNEEQ, comme ailleurs, il nous reste une place à prendre…»
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