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Agir sans délai pour corriger la réforme

Lettre d’opinion publiée dans Cyberpresse, le mardi 12 février 2008

En regard de la réforme au secondaire, les projecteurs sont concentrés sur la question du moratoire, suite à l’appui accordé par quelques dirigeants péquistes au manifeste de la coalition Stoppons la réforme ! Nous partageons certainement avec les collègues de la Fédération autonome de l’enseignement (FAE), principale composante de la coalition, l’urgence d’agir pour limiter le gâchis. Nous partageons ce sentiment, moins par adhésion à la pertinence du moratoire, qui pourrait nuire aux élèves déjà engagés dans cette réforme, que pour l’urgence d’apporter les correctifs nécessaires à une réforme qui, de l’avis général, a raté sa cible.

Le moratoire avive aujourd’hui les démarcations politiques et organisationnelles et il est certainement utilisé à des fins électoralistes. Nous ne pouvons pas manquer de remarquer que messieurs Landry et Cie furent à la gouverne de l’état québécois lorsque la réforme fut implantée. Mal informés, semble-t-il ? Que de commentaires superficiels ne faut-il pas entendre ! Il est ironique que cette réforme, qui s’éloigne des idées du feu Crédit social que ressuscite parfois l’ADQ, offre une nouvelle tribune politique à Mario Dumont ! Nous croyons que les débats ne doivent pas nous faire perdre le fond du problème : un changement de cap rapide s’impose.

Crucial d’apporter des correctifs immédiats

Il apparaît crucial que des correctifs immédiats soient introduits et certaines choses peuvent être faites, sans précipitation, avant la prochaine rentrée scolaire. Si un moratoire était imposé, les élèves qui termineront leur 3e secondaire en juin seraient plongés, la session suivante, dans un cadre d’apprentissage qu’ils n’ont même pas connu. Mais si rien n’est fait par ailleurs, la régression observée se poursuivra au deuxième cycle du secondaire. Quels élèves se présenteront aux portes de l’enseignement supérieur à l’automne 2010 ?

La ministre de l’Éducation, madame Courchesne, promet d’agir sur quelques aspects d’ici peu. Depuis sa nomination, nombre de voix, dont la nôtre, se sont exprimées pour l’inciter à prendre à bras le corps le problème de la réforme au secondaire, avant que se termine l’année en cours. Le seul geste concret qu’elle a posé fut la remise en place du bulletin chiffré, une directive inégalement suivie qui ne changeait rien à la nature de ce qui est évalué. Une mesure cosmétique qui apparaît, en l’absence de toute autre perspective pour un véritable changement, un geste tout aussi électoraliste de la part d’un gouvernement minoritaire.

Avant la rentrée scolaire …

Il serait essentiel de réunir rapidement les représentantes et représentants enseignants, dans un chantier pour identifier les correctifs qu’il serait réaliste d’introduire, avant la prochaine rentrée scolaire. Dès le début de son implantation, nous avons développé une critique de la réforme au secondaire et demandé un bilan complet à partir de l’expérience du personnel enseignant. Nous avons très tôt mis en relief la l’aspect bureaucratique de son implantation et nous adhérons à l’idée de centrer le débat sur une relativisation des compétences, qui semblent avoir pris toute la place au détriment des connaissances, un paradigme que nous n’avons eu de cesse de critiquer depuis son implantation en 1993 dans les programmes du collégial.

Préoccupés de manière plus générale par la qualité de notre système d’éducation, nous soutenons à cet égard l’importance d’accroître les moyens mis à la disposition du personnel enseignant, contrairement à l’approche qui veut leur imposer une obligation de résultat.

Sur le fond, soit la nécessité de correctifs importants, nous ne pouvons qu’a bonder dans le sens de la coalition Stoppons la réforme ! Nous croyons incontournable dans le contexte actuel que cela soit fait avec la participation active de celles et de ceux qui appliquent tous les jours les programmes édictés par le ministère. Un système d’éducation solide ne peut faire l’économie de l’adhésion du personnel enseignant, ce que le ministère semble oublier régulièrement. Trop d’élèves auront à terme souffert de cet oubli, des errances de fond et d’application d’un nouveau credo pédagogique. Hier comme aujourd’hui, la mission de l’éducation ne peut être considérée autrement que sous l’angle du développement d’une société démocratique. Elle constitue de ce point vu un choix social et les nombreuses voix qui s’élèvent en faveur d’une révision de la réforme, auxquelles nous joignons la nôtre, devraient en ce sens inciter la ministre à miser davantage sur la participation du milieu de l’éducation au choix des changements qui s’imposent.

Ronald Cameron, président de la

Fédération nationale des enseignantes et des enseignants du Québec (CSN)